Banques publiques de développement : un devoir « de ne pas nuire »

Dans une déclaration collective, plus de 50 organisations de la société civile demandent aux banques publiques de développement (BPD) de revoir leur copie sur leurs engagements […]

Dans une déclaration collective, plus de 50 organisations de la société civile demandent aux banques publiques de développement (BPD) de revoir leur copie sur leurs engagements – notamment moraux… et prendre des mesures radicales et innovantes contre les violations des droits de l’homme et la destruction de l’environnement dans les pays qu’elles sont censées aider. Elles rappellent que tout projet financé par ces BPD ne doit pas se faire au détriment des groupes vulnérables, de l’environnement et des libertés collectives, mais incarner au contraire « la voix des communautés, les valeurs démocratiques et la justice environnementale. »

Les effets du Covid-19 et du changement climatique, liés aux violations des droits humains et aux risques croissants pour les militants dans le monde, n’ont fait qu’accentuer la nécessité de changer les pratiques actuelles. Aujourd’hui, les BPD tardent à s’attaquer aux inégalités et laissent les organisations de la société civile trouver elles-mêmes des moyens de subsistance dignes et des mesures en faveur de la justice climatique, sociale, de genre et raciale. Le collectif signataire appelle les BPD à agir : elles « doivent atteindre la cible lorsqu’il s’agit de soutenir la transformation des économies et des systèmes financiers vers la durabilité et de répondre aux besoins les plus pressants des citoyens du monde entier », redonner du sens aux services publics, gages de sociétés justes et équitables au lieu de favoriser leur privatisation.

Les chiffres actuels sont alarmants : neuf personnes sur dix vivent dans des pays où les libertés civiques sont sévèrement restreintes et un militant de l’environnement a été tué tous les deux jours en moyenne au cours des derniers 10 ans. Pour les organisations de la société civile, les BPD « sont obligées de reconnaître et d’intégrer les droits humains dans leurs plans et actions », au nom, expliquent-elles, d’un devoir de « ne pas nuire ». Sans cette implication des BPD, il y aura dans ces communautés aussi délaissées qu’affaiblies plus de dégradation environnementale, moins de participation démocratique, et, préviennent-elles, une crise qui sera pire que celle d’aujourd’hui.

Exemple parmi d’autres, les pays du Sahara et du Sahel « confrontés à la plus grave crise sécuritaire de leur histoire, liée au changement climatique, à la justice sociale et aux inégalités dans la région ». Pour Oluseyi Oyebisi, directeur exécutif du Réseau nigérian des ONG (NNNGO), le réseau national nigérian de 3 700 ONG, « la région, marquée par de fortes vulnérabilités économiques (manque d’opportunités, en particulier pour les jeunes), sociales (limitation de l’accès équitable aux services sociaux de base) et climatiques, présente des indicateurs de développement humain parmi les plus bas au monde ». Selon ce représentant, cette situation critique qui s’explique par l’insécurité, mais aussi le mauvais état des infrastructures et les conditions géographiques difficiles, doit bénéficier d’un engagement fort des BPD auprès des organisations de la société civile et des initiatives communautaires « qui soutiennent les programmes étatiques de décentralisation, de réformes du secteur de la sécurité et de réconciliation. Cela permettra de réduire la vulnérabilité des populations et de prévenir l’extrémisme violent. »